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Sujet n°12247 créé le 24/06/2008 à 23:01 par Kenji - Vu 72815 fois par 4489 utilisateurs
   
Pages : 12... 15... 30... 434445
Message n° 4222225, posté à 20:21 le 11/02/2017  
+1.00
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Gan
RIP TANIGUCHI :'(
Message n° 4256113, posté à 01:04 le 12/11/2017  
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Baje
Inuyashiki
J'ai fini pour voir. Un des trucs les plus inutiles et débile que j'ai pu lire. Même si gantz était partie en couille, c'est 1 000 fois pire.

--
Si être normal est d'usage, cela revient à abandonner toute chance de progrès. Qui veut être normal ?
Message n° 4258145, posté à 22:15 le 06/12/2017  
+1.49
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Gan
Hé, tu lis quoi Gan, en ce moment ? C'est noël, t'as une idée cadeau ?
Bah, plusieurs trucs.
Tiens, je te fais un petit topo.
Bisous, copain.
Première partie
 [x]
Ajin par Gamon Sakurai
Alors, je sais pas pourquoi.
J'étais très réticent avant de commencer ce manga.
Le topo de base m'emballait franchement pas et le tome 1 puait un peu du fion.
En gros, l'histoire est plutôt simple.
A notre époque, on découvre que certaines personnes peuvent revenir à la vie directement après leur mort.
Des cas marginaux, on en dénombre pas plus d'une cinquantaine.
Ils auraient ce don car ils sont habités par une espèce d'entité invisible à l'oeil des humains.
On les appelle les Ajins.
Donc B-A-BA de l'amorce d'histoire sans originalité :
Le héros meurt dès les dix premières pages.
Bah oui, parce que sinon, si c'est pas lui-même un Ajin
pourquoi tu lis ce livre, tu vas me demander ?
En lisant le premier tome, je sais pas.
Parce qu'on enquille les clichés narratifs.
Bien évidemment "le méchant gouvernement" va vouloir attraper notre cher héros
pour faire des expériences horribles sur lui.
Alors, le truc, c'est que l'auteur a partir du tome 3 va se jouer de ces ficelles narratives pour mieux nous surprendre.
Et là, où moi j'en suis dans le récit, on en sait toujours pas plus sur ce que sont ces entités. Non, l'auteur a l'air de s'en foutre. Ce qui l'intéresse c'est de mettre en scènes les capacités de celles-ci.
Moi ce qui m'a surpris, c'est que très rapidement on se retrouve devant un récit avec des thèmes d'actualités ( je pense au terrorisme ) et qui a un discours politique assez affirmé.
En fait, sans trop en dire, rapidement le héros va faire la connaissance d'un autre Ajin, qui sous couvert de vouloir représenter leur "race" et leur donner des droits au même titre que ceux des humains lambda, ne désire qu'apporter le chaos.
Cela se traduit par des scènes assez intenses de terrorismes, de destruction psychique comme somatique, de fusillades sous couvert de liberté...
L'auteur possède une maîtrise chirurgicale du dessin quand il s'agit de décortiquer une scène d'action, c'est indéniable. Cela monte crescendo depuis le tome 3. Les enjeux deviennent de plus en plus important. On veut la suite.
France : 10 tomes disponibles. Distribution par Glénat. Un effort louable sur la traduction et la correction est à noter pour cette édition.
Japon : 11 tomes disponibles. En cours de parution.
______
 [x]
Fire Punch de Tatsuki Fujimoto
Je suis tout fébrile quand je pense à ce manga.
Je crois que c'est mon coup de coeur de ces dernières années.
C'est incroyable. Je précise, à mes yeux.
Mais c'est incroyable.
On a l'impression que l'auteur s'en bat complètement les couilles de ce que toi, lecteur, tu peux penser.
Le mec va au bout de ses idées quitte à laisser pas mal de gens sur le carreau.
Il hésite pas à remettre en question son récit à chaque tome.
Il faut vraiment lire le second tome pour voir de quoi je parle.
Ce tome m'a complètement halluciné.
Mais qu'est-ce que c'est bien. C'est très dur mais c'est très bien.
Pour ne pas casser le plaisir, je ne parlerais que du début.
Sur une Terre, ayant subi une second ère glaciaire, le reste de l'Humanité survit tant bien que mal.
Certains sont appelés les Elus. Car ils ont un pouvoir.
Qui varie en fonction des individus.
Agni a 15 ans, il vit avec sa soeur dans un petit hameau reclus au milieu de nulle part.
La population se meurt de famine.
Alors Agni a une idée. Avec sa soeur, ce sont des élus.
Et leur pouvoir est simple. Ils peuvent régénérer toutes les parties de leur corps.
Agni, lui, quasi-instantanément.
Alors ils décident de se couper des membres de leur corps pour pouvoir nourrir les leurs.
Car ils n'ont pas d'autres choix. C'est ça ou la mort du grand froid.
Un jour, une garnison de la Citadelle, rentre d'une escarmouche.
Elle décide de s'arrêter dans le village d'Agni pour se reposer et se ravitailler en vivre.
Le jeune commandant découvre avec horreur la vérité.
Et lui aussi est un élu. Il possède le pouvoir des flammes éternelles.
Tant que lui ne meurt pas, ses flammes perdureront.
Considérant le village, comme un ramassis de dégénérés cannibales,
il décide de le raser avec ses flammes.
Sa soeur meurt, mais Agni survit.
Parce que même si les flammes le consument, il se régénère aussi vite.
Et il souffrira et apprendra à vivre avec ce feu éternel qui le consume physiquement.
Et 7 ans plus tard, il décidera de se venger.
Et d'une vengeance, on le verra devenir un Dieu.
Et je n'en dirais pas plus.
Parce qu'après, ce serait vous gâcher le tome 2.
Incroyable.
France : 4 tomes disponibles. Distribution par Kazé. Rien à redire sur la qualité.
Japon : Série terminée en 8 tomes.
______
 [x]
dead dead demons de dedede destruction de Inio Asano
Un nom à coucher dehors.
Mais la nouvelle oeuvre de l'auteur du chef-d'oeuvre Oyasumi PunPun!.
Et je fais pas durer le suspens, c'est évidemment très bien.
Un 31 août, la Terre est attaqué ( ou est-ce vraiment la vérité ? ) par des extra-terrestres.
Mais tout ne se passe comme prévu.
En fait, rien se passe vraiment.
Le vaisseau-mère reste en orbite gravitationnel au-dessus de la ville de Tokyo
sans montrer le moindre signe d'animosité envers l'Homme.
Des années passent, et l'être-humain, en quête perpétuel de réponse,
ne comprends pas la passivité de ces étrangers.
Pourquoi n'attaquent-t-ils pas ? L'Homme livré à lui même s'aliène tout seul.
Et c'est dans ce sentiment d'inconnu et d'avenir incertain
que l'on suit la vie de 5 lycéennes devant passer leur bac et décider de leur carrière.
Pour ceux qui aiment les mangas typés tranche de vie, allez-y, c'est le haut du panier.
Et c'est un super cadeau à faire qui sort des sentiers battus.
France : 5 tomes disponibles. Distribué par Kana au format Big Kana.
Japon : 6 tomes disponibles. En cours de parution.
Message n° 4297261, posté à 16:36 le 31/01/2020  
+0.48
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Baje
L'attaque des titans
Je me suis mis à fond dans l'attaque des titans. J'ai lu 23 tomes je crois.
Je suis très déçu. Non pas que j'en attendais un truc de fou mais tout le monde me dit que c'est génial.
Depuis le départ, les dialogues, très nombreux, sont assez mal écrit et ça ne raconte pas grand chose tout en durant 3 ans. En plus de ça ça se cale très souvent en pleins combats, histoire de bien nous faire chier, et ça nous prends pour des cons, en nous expliquant que le mec va péter sur le titan pour l'enrhumer, tout ça juste avant qu'il déclenche son fameux pet. Je me moque mais c'est limite ça.
Les japonais devrait vraiment faire comme les américains pour les comics quand ils n'ont pas de talent d'écriture. En plus de ça, la traduction française est dégueulasse (mais genre vraiment).
Là j'en suis à la grosse révélation du manga (Que tout ceux qui ont commencé attendent), et c'est écrit totalement n'importe comment. On y croit jamais, mais du genre JAMAIS, les personnages sont tous plus débiles les uns que les autres. Je crois que le blabla sur la révélation dure 1 tome voir plus et ya pas un personnage pour en rattraper un autre. La psychologie s'est évadé quand elle a vu le bordel et un ado de 15 ans aurait plus de jugeote.
Pour faire un point godwin, sans le vouloir tellement l'inspiration est plus qu'évidente,
SPOILER!!!
c'est comme si les juifs se battaient pour les nazis car on leur a dit que les juifs sont très très méchant et que donc pour se rattraper, faut tuer d'autres juifs pour le compte des nazis
Je n'arrête pas car je suis bien trop loin mais on est à un niveau d'écriture assez lamentable. Les deux justifications du pourquoi qu'ils coopèrent sont nulle à chier. Et l'auteur n'hésite pas à invoquer des Deus Ex fumeux pour justifier le passé du truc, c'est aussi nul à chier.
J'espère de bons fights et moins de blabla mais j'attends à peu près rien de la suite. Heuresement que les dessins se sont vraiment améliorés.

--
Si être normal est d'usage, cela revient à abandonner toute chance de progrès. Qui veut être normal ?
*édité à 16:38 le 31/01/2020
Message n° 4310921, posté à 03:09 le 11/01/2021  
+0.48
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Baje
Je continue après une pause d'un an. En fait je me souvenais pas de cet avis et j'avais gardé un souvenir non pas bon mais plus positif que ce que j'avais écrit au dessus.
Et en fait c'est encore pire qu'avant. Tout est écrit à la pisse à chaque chapitre. Ya plus un seul personnage de potable.
Ils ont tous des motivations toutes plus débiles les unes que les autres. Ya même des personnages en mode haine totale pour te servir des scènes ultra niaises par la suite, belle spécialité des japonais.
C'est de plus en plus catastrophique. Heureusement, la fin arrive bientôt. dumb

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Si être normal est d'usage, cela revient à abandonner toute chance de progrès. Qui veut être normal ?
*édité à 03:10 le 11/01/2021
Message n° 4310927, posté à 08:41 le 11/01/2021  
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Gan
J’évolue avec le temps, mes lectures aussi.
Je cherche des choses peut-être un peu plus adultes ou profondes.
Je me suis donc mis à écrire des articles plus détaillés en fonction des titres que je lis. Parfois en faisant un exercice de recontextualisation, avec mes quelques connaissances amassées par-ci par-là grâce à mon travail de recherche.
Ces articles seront ajoutés petit à petit sur un blog commun qu’une amie tient à jour : Artnachronisme
Le premier titre disponible est :
 [x]
Peuple Invisible de Shohei Kusunoki
Publié aux éditions Cornélius
Article
士農工商, terme se traduisant littéralement par shinōkōshō, en référence au système shi (士), nō (農), kō (工) et shō (商). Ce système hiérarchique confucéen mis en place lors de la 江戸時代 (Edo Jidai ou période Edo – de 1600 à 1868) se caractérise par une réorganisation sociétale en profondeur en classifiant chaque individu masculin par rapport à leur 身分制度 (mibun seido ou origines socio-professionnelles). Si selon la culture japonaise, il serait malvenu de parler de système de castes car il n’était jamais appliqué stricto-sensu dans le réel, il est à noter que ce système a pourtant eu un impact considérable dans l’inconscient collectif de ce pays, imprégnant chacun des individus jusqu’à aujourd’hui. Ce modèle théorique a su fournir des raisons soi-disant valables pour restreindre privilèges et responsabilités en fonction de la classe d’appartenance. Le but étant avant tout de ramener un semblant d’ordre dans la société.
Si cette politique fait suite à la promulgation du 鎖国 (Sakoku – litt. « fermeture du pays) par le Shogun en place, Iemitsu Tokugawa, entraînant une période d’isolationnisme qui durera pratiquement 200 ans, il est pourtant important de souligner que ce traité des « quatre divisions de la société » trouve ses racines dans une accumulation d’événements antérieurs. Les deux les plus notables étant d’ailleurs particulièrement intriqués, puisque l’un est à l’origine de l’autre. Pour comprendre cette politique isolationniste mise en place à partir de 1650, il nous faut remonter 100 ans en arrière. 1543, point de départ connu de l’époque 南蛮貿易時代 (Nanban-boeki-jidai – Période d’échange avec les Barbares du Sud).
Ici, les barbares sont les européens qui venaient vendre leurs denrées en venant du Sud par bateau. Si cette période d’échange fut particulièrement faste, elle était pourtant perçue d’un mauvais œil par les autorités dirigeantes en place. Le terme Nanban soulignant une différence culturelle importante à leurs yeux. Les étrangers étaient perçus comme des barbares, là où la culture japonaise était considérée comme bien plus sophistiquée. On entrevoit ici les prémices d’une volonté de préserver.
En 1549 arrive Saint François-Xavier sur le sol japonais. Commence alors la diffusion du christianisme. Religion qui deviendra hautement problématique pour le shogunat, celui-ci se référant exclusivement à une philosophie shintoïste. Si les portugais étaient les premiers à commercer avec le Japon, les espagnols suivront rapidement, puis les hollandais. L’arrivée des espagnols va accentuer l’arrivée des missionnaires jésuites, tout en créant une situation de tension avec les portugais. De nombreux conflits vont alors éclater dans les eaux du territoire japonais entre ces deux pays. Parallèlement à cette situation, s’effectue l’évangélisation des Daimyos et paysans par les jésuites et franciscains.
Le Shogun alors en place, Toyotomi Hideyoshi, prononce en 1587 l’expulsion des chrétiens car ils sont vus comme une menace pour le pouvoir en place. Ce décret ne sera jamais réellement appliqué pour raisons économique et commerciale, même s’il est à noter une occurrence importante en 1597, avec la crucifixion de 26 japonais chrétiens à Nagasaki. Tokugawa, le shogun successeur, fait lui d’abord preuve de tolérance car le commerce avec les portugais lui est profitable. Pourtant, les relations commerciales avec la Hollande lui permettront d’apprendre le conflit existant entre l’Eglise catholique et le protestantisme en Europe. Son attitude changera alors du tout au tout, surtout par peur de voir les convertis montrer une plus grande loyauté envers l’Eglise qu’envers l’Empereur.
À partir de 1612, les répressions et les persécutions envers les chrétiens vont se renforcer et atteindre leur paroxysme en 1637 avec la 島原の乱 (Shimabara No Ran – Rébellion de Shimabara). Cette rébellion opposera le gouvernement et des rebelles chrétiens pour la plupart paysans. Ce soulèvement sera réprimé dans la violence et sur les 35 000 chrétiens en présence (civils inclus), tous seront tués. Ce moment marque la fin de la pratique ouverte du christianisme au Japon. Deux ans plus tard, Ieyasu Tokugawa en profite pour mettre en place un contrôle plus important au niveau des zones portuaires vis-à-vis des étrangers ; notamment avec les portugais et les espagnols, principaux vecteurs de missionnaires chrétiens. On pensera, notamment, au 3 août 1640, où un bateau portugais fut incendié près de Nagasaki. Les 57 émissaires d’une ambassade portugaise furent décapités. On laissa l’équipage en vie pour faire un compte-rendu de ce qu’il s’était passé.
Entre les différentes escarmouches entre portugais et espagnols dans les mers du Japon et l’expansion du christianisme, le Japon mettra en place le 鎖国 (Sakoku), période d’isolationnisme qui dura pratiquement 200 ans. Seuls les hollandais étaient autorisés à accoster et commercer avec le Japon pour la simple raison qu’ils s’occupaient de détruire les navires portugais et espagnols à l’origine des conflits en mer. Leur aide au Japon ne s’arrêta pas là puisque les hollandais participèrent aussi à la répression du christianisme lors de la révolte de Shimabara.
Durant cette période, pour stabiliser le début des fragilisation sociétales perçues par le gouvernement, le shogunat met en place le fameux système shinōkōshō durant la période Edo. Suivra plus tard, après l’isolationnisme, la mise en place du 国家神道 (Kokka Shinto – Shintoïsme d’Etat). Plus précisément au départ de l’ère Meiji, en 1868 et s’achèvera en 1945, avec la défaite du Japon lors de la Seconde Guerre mondiale. Avec la promulgation de cette idéologie, le shintoïsme devient la religion officielle de l’Empire du Japon et fait de l’Empereur le représentant divin sur Terre. Si je ne m’épancherai pas sur l’ère Meiji, il est important de montrer que cette dernière promulgation idéologique vient à la suite de cette mise en place structurale de la société, toujours dans un souci de maintenir l’ordre en place.
Etonnamment, ce traité des « quatre divisions de la société » ne s’articulait pas autour de la richesse financière et du capital mais plutôt autour de l’utilité du rôle de chacun au développement de la société. Ainsi, si les samouraïs (士 – shi) étaient placés au sommet de la société du fait de leur exemplarité morale élevée, les paysans (農 – nō) venaient directement à leur suite dans la hiérarchie. Classe pourtant majoritairement en situation de précarité financière, sa haute place s’expliquait par le fait que les paysans produisent la chose la plus importante des besoins primaires : la nourriture. De ce fait, ils étaient tenus en haute estime pour leur capacité à créer à partir de la terre. En troisième position nous retrouvons les artisans (工 – kō) qui transforment, subliment la création primaire et sont à la source de la création des biens non essentiels. Enfin, à la base de l’ordre social, se trouvent les marchands (商 – shō). Malgré leur capital plus élevé que les autres classes, ils étaient mal perçus du fait de leur capacité à générer des richesses sans production de biens.
Pourtant cette division en quatre groupes n’était aucunement représentative de la réalité de la société sous le gouvernement de Tokugawa. Si les prêtres shintos et les nobles de la cour de l’Empereur avaient un statut à part et n’étaient pas pris en compte dans le système shinōkōshō, il existait deux autres groupes importants, invisibilisés car considérés comme tabous, et un dernier groupe à peine mentionné. Là où le titre du recueil de Kusunoki en japonais Saisetsu Ni Mau pourrait se comprendre en français par « Les retrouvailles », le titre français choisi par Cornélius, Peuple invisible, semble dénoter d’une certaine pertinence au regard du contenu que nous offre cette anthologie. Le regretté Kusunoki, parti à l’âge de 30 ans, s’évertue à raconter la vie des petites gens dans un Japon empreint de traditionalisme.
Derrière l’expression Peuple invisible, on ne peut s’empêcher de penser à ces groupes que la culture de l’époque préférait ne pas nommer. A savoir les 部落民 (burakumin) et les 非人 (hinin). Le premier, autrefois nommé péjorativement 穢多 (eta – parias), regroupait toutes les personnes qui pratiquaient une activité liée à la mort (bouchers, tanneurs, etc). Ils étaient perçus comme des parias par le reste de la société à cause des préjugés religieux de cette période. La caractéristique principale de ce groupe était la transmission filiale. En effet, un burakumin naissait burakumin, sans perspective d’évolution sociale car on ne pouvait sortir de ce groupe. Il y a une mise au ban à vie aux marges de la société.
Les hinins, quant à eux, étaient une catégorie d’intouchables car perçus comme déchets de la société. Elle comprenait les criminels et les mendiants. Enfin, on ne peut s’empêcher aussi de penser à ce dernier groupe, à peine mentionné, les femmes. La période d’Edo n’aura été que régression quant à l’importance de la place du féminin au sein de la société japonaise. Bonne épouse, formidable fée du logis, mère éducatrice, travailleuse de la terre ou geisha. La femme de la période Edo ne devient plus qu’objet relégué sous le toit conjugal ou dans les maisons de passe de l’époque. Et la beauté de Peuple invisible est de nous montrer les différentes facettes de cette société refermée sur elle-même.
Pourtant si l’invisible cache des choses dans le réel, il est aussi une barrière entre notre psyché interne et l’environnement extérieur. La culture durant la période d’Edo avait cette propension à pousser chacun à refouler ses émotions les plus fortes et les plus profondes. Car comme le sous-entend le concept philosophique d’Amae propre au Japon, l’individu vit pour et à travers le groupe. L’individualité est moins importante que le sacrifice de soi pour le groupe. Et derrière cet invisible, ce que l’on voit réellement, c’est la représentation d’un ressentiment diffus et d’une mélancolie suggérée propre au culturel japonais. Un ressentiment lié à la blessure narcissique de voir son honneur entaché et sa dignité bafouée.
La première nouvelle de ce recueil, Les Cloches du soir, semble d’ailleurs faire écho à cette pensée du ressentiment corrélée au social et à la division des groupes. On y voit un vieux samouraï venir confronter un marchand en duel pour laver son honneur. Rien n’est jamais réellement mis en mot et l’origine du conflit n’est jamais révélé. Pourtant derrière le dessin, dans l’invisible de l’Histoire, on peut entrevoir un nœud narcissique. Il faut savoir que les samouraïs, durant la période d’Edo, bénéficiait d’un salaire fixe. Le souci étant qu’après la réunification du japon et le développement de l’urbanisme, il y a eu une flambée des prix. Mais le salaire des samouraïs, lui, n’a pourtant pas augmenté.
Alors même qu'ils étaient au sommet de la division groupale en place, ils étaient économiquement très modestes pour la plupart. Une situation difficile à vivre et nombre d’entre eux ont du contracter des prêts auprès des commerçants, groupe visible le plus bas hiérarchiquement, et pourtant le plus opulent. Pour les samouraïs, il y a ici, une haute atteinte à leur amour-propre, leur honneur et leur dignité. De nombreuses rixes entre samouraïs et commerçants ont pu être consignées dans les textes de l’époque.
Et ces évènements arrivaient alors que les commerçants étaient sommés par décret de l’Empereur de cacher leur capital financier, du fait de leur place dans la hiérarchie. Il en était de même avec les paysans, qui de leur côté, souffraient d’un ressentiment à un niveau interne à ce groupe. On pouvait y observer une forte disparité au niveau du capital avec des paysans s’enrichissant grâce à leurs rendements et leur expansion des terres agricoles, là où d’autres de recourir au surendettement pour survivre pratiquement au jour le jour.
La dernière force de cette œuvre est le parallèle que l’on peut faire avec l’actualité de ces dernières années. En effet, malgré le contexte historique choisi, on ne peut que saluer la capacité de Kusunoki à faire de ses histoires un reflet de la situation d’aujourd’hui. La place de la femme au Japon a peu évolué depuis 400 ans dans l’inconscient collectif. Malgré quelques « percées » au niveau législatif avec modification de la loi sur le viol et le harcèlement sexuel en 2017, ainsi que la mise en place de plans économiques tels que les Womenomics, ayant pour but d’intégrer plus facilement les femmes dans le monde du travail.
Cependant, à l’heure actuelle, les femmes ne représentent même pas 4% des cadres en entreprise. Le gouvernement en place ne se cachant jamais réellement quant à ses réelles intentions. Certains anciens ministres, comme celui de la santé, n’hésitant pas à leur rappeler qu’elles seraient mieux à la maison. La pandémie et ses retombées sur l’économie n’ont pas non plus épargné ces femmes employées, souffrant d’une forte précarité. Les chiffres d’octobre 2020 montrant une augmentation de plus de 80% des suicides chez les femmes de moins de 30 ans par rapport aux mêmes périodes des années précédentes.
Les burakumin, quant à eux, malgré l’abolition officielle de leur statut de parias en 1871 font toujours l’objet de discriminations. Certaines familles modernes n’acceptent pas que leurs enfants se marient avec des individus issus d’une lignée burakumin car cela entacherait à jamais le statut de leur famille. Ils souffrent aussi de discriminations liées à l’emploi, puisqu’ils sont moins payés que d’autres, et liées à l’habitation, certains propriétaires refusant de leur louer un bien. Dans les années 90, la communauté burakumin comptaient encore plus de deux millions de personnes vivant dans des ghettos à Osaka, Tokyo et Kyoto. Ashita No Joe est une belle représentation de ces quartiers appelées Doya dans les années 70.
Bonne lecture à ceux qui se laisseront tenter.
J’ajouterais d’autres articles au fur et à mesure.

*édité à 14:08 le 12/01/2021
Message n° 4310975, posté à 11:28 le 12/01/2021  
+0.82
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mort5
Superbe article très détaillé,
je reviendrais car c'est tout à fait mon style de lecture^^

Message n° 4310977, posté à 13:23 le 12/01/2021  
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Gan
Merci à toi.
J'essaierai d'en mettre régulièrement, ici.
Si tu as instagram, tu peux me suivre sur _mmythos_manga.
Beaucoup d'articles dans ce style y sont déjà présent même si ce n'est pas la plateforme la plus ergonomique pour les lire, je le conçois.
C'est d'ailleurs pour cela qu'ils vont être up' petit à petit sur le blog de mon amie.
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